mardi 6 juillet 2010

Les affres de l'attente

De rendez-vous en rendez-vous, je ne prenais pas de poids et mon ventre ne s’arrondissait toujours pas malgré toutes les heures passées à m’extasier devant les petits clapotis que faisaient mes enfants dans ma bedaine. Ils étaient pour moi comme un témoignage précieux, une preuve claire de ce double contenu que je portais. Je les sentais si distinctement remuer que j’ai commencé dès lors à développer une relation différente avec chacun d’eux et par le fait même, à culpabiliser de l’attention donnée à l’un ou à l’autre. Julien avait un nom mais pas le bébé numéro un. Numéro un avait un parrain/marraine, par contre. Qu’est-ce qui était plus important? Et j’arrivais à faire bouger numéro un, mais pas Julien. Est-ce que je ne m’en faisais pas plus pour Julien que pour son frère? Et c’était ainsi à chaque jour. En fait, je confesse ici quelque chose de très intime pour la mère en moi… C’est encore ainsi, mais j’ai appris à vivre avec ce sentiment. Le fait est que je n’ai pas la même relation avec chacun de mes enfants. Et bébé numéro un, après avoir entendu Laurent-Matthias-Loϊc-Thierry-Xavier, se prénomme maintenant Antoine. Cela peut-il déranger son développement comparativement à Julien qui a toujours porté ce prénom? Je blague… un peu.

Vers le dernier trimestre de ma grossesse, je me suis mise à faire des cauchemars pas possibles dans lesquels mon utérus disproportionné s’amusait à me cracher non pas un, ni deux et encore moins trois bébés mais bel et bien quatre rejetons. Je rêvais aussi que je ne me souvenais pas de leur naissance et que l’on m’apportait deux gros bébés déjà élevés. Mais la pire de ces fantaisies nocturnes est définitivement l’hospitalisation de l’un d’eux à Ottawa alors que l’autre était traité à Matane! Je passais tout mon temps sur la route et une fois arrivée à l’hôpital de l’un, je reprenais le volant pour voir l’autre! Les psychanalystes en herbe vous expliqueront qu’en fait, j’appréhendais la double arrivée bénie et que je ne me croyais pas capable de donner toute l’attention que méritent de tels trésors.

Je n’ai commencé à prendre du poids qu’à la 21e semaine. Exit le mythe de la femme enceinte de jumeaux qui prend 80 livres et roule jusqu’au frigo pour se gaver de crème glacée aux pickles. Les nausées des premiers mois ont vite été remplacées par un utérus qui me donnait la sensation d’être à satiété après deux bouchées. À la 27e semaine, je recevais mon congé préventif. À la 30e, j’avais déjà l’air d’être sur le point d’accoucher. J’avais des contractions depuis la 16e semaine et ma pression artérielle commençait à s’élever doucement. Mes bilans PE (pré éclampsie) revenaient toujours négatifs, pas d’inquiétudes de ce côté-là. Par contre, depuis le 4e mois, j’avais beaucoup de mal à me déplacer. Au cours des nombreuses virées dans les centres de rénovation que nous avons faites, nous avons appris à choisir ceux qui possédaient une chaise roulante, car le hobby de mon conjoint s’était transformé en frénésie. Toutes les rénos se devaient d’être complétées à l’arrivée des enfants, pas question de laisser la moindre moulure en plan! J’avais ordre de ne pas accoucher avant que tout soit terminé. Et lui de travailler comme un fou, de cesser l’entraînement et les soirées souper-ciné. Les dites soirées n’étant plus si agréables depuis que je me dandinais aux toilettes à toutes les demi-heures, cela ne me dérangeait pas trop.

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